Le claquement de porte violent résonna sourdement dans l'édifice où un silence paisible régnait jusqu'alors. Ce bruit dérangeant fut vite suivit d'un grognement de rage poussé par une jeune femme. Si l'on n'avait pas clairement vu la bouche de cette jeune femme s'ouvrir pile au moment du cri plutôt masculin, l'on n'aurait jamais soupçonné qu'un son aussi disgracieux aurait pu sortir d'une si délicate créature. Mais Vincitrine avait bien rugit de colère. Elle était entrée dans son loft en faisant bien en sorte de claquer la porte avec le plus de force qu'elle en était capable derrière elle. Elle en avait marre, elle était frustrée, et le monde entier devait obligatoirement en être au courant. Aussitôt son entrée voulue dramatique ― un de ses seuls succès de la journée, mademoiselle se dirigea vers la cuisine. Arrivée à destination, elle fouilla sans gêne pour trouver ce qu'elle désirait: un port de crème glacée au chocolat, un sac de pop-corn, et un sac de M&M's. Vous l'aurez deviné: Vincitrine était une mangeuse. Elle mangeait beaucoup, et tout le temps. Les rumeurs supposant qu'elle souffrait de boulimie étaient complètement fausses. Alors, qu'elle soit déprimée, heureuse, en colère, satisfaite, fatiguée, ou pleine d'énergie; la jeune femme mangeait. Ce fut donc en marmonnant des insultes à quiconque voulait bien les écouter qu'elle retourna dans le salon dans le but de s'écraser nonchalamment sur le divan en savourant sa crème glacée au chocolat, son pop-corn & ses M&M's. L'origine de cette frustration dévastatrice ? Elle ne voulait même pas y penser. Une chose était certaine: la première personne qui venait la déranger dans son moment de calme se ferait décapiter.

Lorsque Vince entra dans le salon pour aller se calmer, elle faillit faire une crise cardiaque et manqua de renverser son pot de crème glacée au chocolat, son pop-corn, et ses M&M's. Là, devant la télévision, une autre jeune femme se tenait, l'air insulté. Cette jeune femme n'était nulle autre que la colocataire exaspérante de Vincitrine. Miss soupira, heureuse en en voyant qu'il ne s'agissait pas d'un voleur, puis l'agacement remplaça ce soulagement. Chercher une colocataire sur internet avait probablement été la plus grande erreur de sa vie; car elle était tombée sur une jeune femme introvertie & inintéressante. Bien évidemment, Vince n'avait pas fourni de véritables efforts pour connaître sa colocataire. En fait, Riley Carolyn Campbell aurait pu être extrêmement intéressante & Vincitrine n'aurait aucun moyen de le savoir.

« Ah merde, t'es là, toi. »

Une fois son opinion de sa colocataire faite bien clairement, elle ne se soucia plus de la deuxième présence & s'installa, comme prévu, nonchalamment sur le divan en dégustant son repas des plus nutritifs. Vince saisit la télécommande & ouvrit la télévision. Rien de particulièrement intéressant ne jouait à cette heure, mais toute excuse pour ne pas avoir à commencer de conversation était bonne. La jeune femme feignit donc durant une bonne dizaine de minutes être intéressée par un documentaire sur les requins.

Soudainement, plus rien. Le noir complet. Plus de lumière, plus d'électricité. Vincitrine avait, depuis sa plus tendre enfance, une phobie du noir, bien qu'elle ne l'admettrait jamais à personne. Plus le néant persistait, plus la peur se faisait plus insistante dans le ventre de la jeune femme. Ça y est, j'vais dégueuler, pensa-t-elle avec affolement. Elle respira lentement pour se reprendre en main, puis, une fausse assurance raisonnant dans sa voix, elle dit:

« Riley ? On a des chandelles quelques part ?»

LUCAS - « You wanna tell the truth, let’s tell the truth. You gave up on me. You didn’t think i could do it. You didn’t think i could get my novel Published, maybe just ain’t care. Because it wasn’t about you, or what you wanted. »
PEYTON - « Well if that’s the truth, if i never cared, why do i buy this book everty time i see it, every stupid damn time Luke! You said i was great. You said i could be great. You said we were destin to be together. You said it to the world, you said it to me and i wish you never had because you dit not mean any of it! »

.. Silence ..

PEYTON - « You know what ? I wanna pay a rent. I don’t know what this is but.. I don’t feel right about it. »
LUCAS - « It’s called being nice to you »
PEYTON - « Maybe it should stop »
LUCAS - « Maybe you’re right. »

J’adore. Encore une fois, je me retrouve trop bien dans la scène, captivée par tous les mots que Lucas Scott dit, occupée à répéter en même temps qu’Hilarie Burton toutes les répliques qu’elle peut bien sortir. Elle est douée cette actrice, je l’ai toujours admirée. Plus jeune, j’avais toujours rêvée d’avoir la chance de jouer le rôle de la grande Peyton Sawyer, aillant toujours été très mordue de la série « Les frères Scott. » Bref, j’avais profitée de cet après-midi de congé - et de job et de colocataire - pour regarder pour la millième fois tous les épisodes d’un de mes saisons préférés. Et ça m’avait aidé, aussi stupide que ça puisse paraître. Je me sentais moins stressée pour mon show, et mois énervée par ma stupide colocataire. Décidément, les frères Scott avaient un effet indéniable sur moi.

Vincitrine. Seul son nom me donne presque envie de grincer des dents. Quelle idée avais-je eu aussi de répondre à cette petite annonce dans le journal ? Quand j’y repensais sérieusement, je n’étais pas si mal chez mes parents. Certes, je les avais toujours sur le dos, et je me sentais comme une petite fille alors qu’à plus de vingt-deux ans on est censée être capable de se débrouiller tout seul - ce qui est mon cas depuis que j’ai dix ans à cause du métier, c’est seulement qu’à Los Angeles la maison de mes parents avaient toujours été la mienne. - Maintenant, je n’avais plus de maison. Non, je partageais un loft avec une fille qui semblait tout faire pour m’exaspérée d’avantage plus les jours avançaient. D’ailleurs, aujourd’hui Vinc’ semblait avoir choisi le cri d’exaspération pour m’exaspéré à mon tour, gâchant ainsi tout le beau travail que les épisodes de ma série avaient eu sur moi. Je l’entends se diriger vers la cuisine, ne disant pas un mot. Je tente de rester concentrer sur la télévision, évitant ainsi une bataille générale, ainsi qu’une engueulade qui se ferait probablement entendre par tout le voisinage. Mais c’est ma coloc qui me cherche en premier, et ce n’est pas sans réplique que je vais la laissé faire.

VINCITRINE - « Ah merde. T’es là, toi. »
RILEY - « Non je fais semblant. Te gêne pas pour moi surtout. »

Évidemment, je n’aurais pas dût dire cela de cette manière, puisqu’elle semble me prendre au mot. Sans rien dire, elle prend la télécommande, et change de poste pour ce qui semble être un documentaire sur les requins. Le pire dans tout ça, c’est qu’elle le laisse à ce poste et ce met à l’écouter, du moins à faire comme-ci cela l’intéressait. C’est bien le bout du bout. Lâchant un soupir plus fort que la moyenne, je me lève et fais bien attention de bloquer sa vu de la télévision pour au moins une bonne trentaine de secondes avant de me rendre à la cuisine où l’odeur du popcorn envahit mes narines. Ça me donne d’ailleurs envie de m’en faire un sac à mon tour, totalement sûre que ce n’est pas ma charmante qui se plaira à partager le sien avec moi. Ouvre le placard, sors le popcorn, sors un sac de la boîte, ouvre le sac, ouvre le micro-ondes, pose le sac, ferme le micro-ondes et démarre la machine. J’entends les « bip, bip, bip » constant de la machine tandis qu’une voix off parlant des requins me vient jusqu’ici.

Et puis black. Comme dans un film d’horreur, la scène typique avant que l’action ne commence réellement. Mon popcorn qui n’a qu’à moitié éclaté s’arrête subitement, alors qu’aucun « bip bip bip » ne vient distraire le froid silence qui s’est imprégné de l’appartement. J’entends Vicitrine se lever du salon, s’approcher à tâtons de la cuisine.

VINCITRINE - « Riley ? On a des chandelles quelque part ? »
RILEY - « Tu as peur peut-être Vanderbilt ? »

Je suis une actrice. Je sais remarquer ce qui est de l’assurance et ce qui n’en est pas. Je souris à l’idée que quelque chose fait peur à la demoiselle. Malgré tout, je cherche maladroitement dans les plus bas tiroirs de la cuisine, là où j’ai placé un peu le bric à brac sans endroit brisé, dont les chandelles qui finalement seront utiles bien plus tôt que je ne l’imaginais. Une fois le feu bien en place sur les chandelles, je me dirige vers le salon, où j’aperçois une Vincitrine au visage qui se veut convaincant, sans réellement l’être. Je m’approche de la fenêtre, pour réaliser qu’il y a une sacrée tempête dehors. Peut-être que ça explique les cheveux mouillés de ma colocataire d’ailleurs..

RILEY - « Il fait pleut comme jamais dehors. Je crois qu’on en a pour un moment sans électricité et sans pouvoir sortir.. »

Et cela annonçait évidemment une soirée seule avec Vanderbilt. Que de plaisirs à venir..

« Non je fais semblant. » Ces mots résonnèrent un peu plus longtemps que le reste de la phrase de Riley dans la tête de miss Vanderbilt. « Ferme les yeux, imagine qu'elle n'est pas là. Elle fait semblant. Respiiiiiiiiire. Aaah-fuuuuu. Aaah-fuuuuuu. » se dit Vince en regardant un poisson se faire avaler tout cru par un requin effrayant. Elle avait des problèmes à contrôler sa colère, et bien qu'elle aurait aimé se déchaîner sur sa colocataire, elle tentait de se calmer. Elle devait se calmer. Les violentes scènes diffusées à la télévision ne rendait pas cette méditation facile. Le sang rouge des poissons flottant dans l'océan & la musique dramatique & bruyante ne faisait qu'alimenter la rage qui bouillonnait en elle. Vincitrine ferma les yeux. Le sofa grinça, des pas s'éloignèrent. « Ah ! Elle s'en va ! » Et un sourire illumina les traits fins de la jeune femme. À la grande déception de Vincitrine, les pas de sa colocataire était partis vers la cuisine, et non vers la porte, et quelques minutes plus tard, elle entendit le pop corn qui éclatait. Comme en écho au soupir de Campbell, Vincitrine expira bruyamment, exprimant tout son découragement.

Le noir. Plus rien. Elle était devenue aveugle ? Non, un tueur en série avait coupé le courant. Un éclair illumina la pièce pour une fraction de seconde. L'orage avait sans doute coupé l'électricité. La colère avait laissé place à l'angoisse. Vincitrine n'aimait pas le noir. « Riley ? On a des chandelles quelque part ? » furent les seuls mots qui parvinrent à s'échapper de sa bouche, dans un ton qui se voulait assuré. Mais à peine eut-elle prononcé ces mots qu'elle eut envie de se frapper la tête contre le mur. Sa tentative de mensonge avait été un échec: la peur résonnait clairement dans ses paroles. Campbell étant une actrice, elle l'avait remarqué, c'était certain.

« Tu as peur peut-être Vanderbilt ? »
« Non, je suis soulagée. J'ai plus à regarder la monstruosité qu'est ton visage. »

Peut-être que sa réplique avait été un peu trop sanglante pour la situation. Mais l'irritation que la remarque de sa colocataire avait fait naître en elle ne pouvait pas être étouffée. Vincitrine n'aimait pas que l'on remarque ses faiblesses. Surtout si elle n'appréciait pas la personne qui les remarquait. Mais, alors que Riley sortait les chandelles & les allumait, une minuscule pointe de remords s'installait dans son estomac. Après tout, sa colocataire avait la gentillesse de s'exécuter alors qu'elle, elle ne faisait que continuer à l'insulter.

« T'veux du pop corn ? »

dit-elle en tendant son bol rempli jusqu'au bords de nourriture sacrée. Vincitrine avait remarqué que celui de Riley n'était pas prêt, la préparation ayant été interrompue par la panne d'électricité. Ce simple geste qui, mine de rien, avait requis un effort colossal & toute la détermination que Vince possédait, était équivalant à des excuses, du moins, aux yeux de la jeune femme.
« Il pleut comme jamais dehors. Je crois qu’on en a pour un moment sans électricité et sans pouvoir sortir.. » Vince tourna la tête et regardant l'air triste dehors. Puis, un nouveau soupir s'échappa de ses lèvres. Les deux jeunes femmes savaient très bien ce que cela voulait dire: une soirée passée en la compagnie de l'autre. La jeune femme se rassit sur le divan, fixant la télévision, bien que l'écran soit complètement noir. Les requins dévorant les tacauds impuissants lui revint en tête. Non. Elle n'allait pas assassiner Riley. Elle ferait des efforts.

« Si on passe la soirée à s'taper d'sus, la nuit va être longue, t'sais. »

Qu'est-ce qu'elle voulait dire ? Même elle ne le savait pas. Mais elle n'avait ni l'envie ni l'énergie de se battre avec sa colocataire durant des heures.